Un espace préhilbertien réel (EPHR)
est un
espace vectoriel qu’on a muni d’un produit scalaire. Si cette notion n’est pas claire, on pourra se reporter à cet article, dont la première section contient les rappels nécessaires.
Le produit scalaire de deux vecteurs
sera noté ![]()
Si
est en outre de dimension finie, on parle plutôt d’espace vectoriel euclidien (EVE).
Dans un EVE de dimension n, une base
est dite orthonormale (BON en abrégé) si elle est formée de vecteurs unitaires (càd : de norme 1) et deux à deux orthogonaux. Il revient au même de dire qu’il s’agit d’une famille orthonormale et génératrice de
puisque « orthonormale » implique « libre ».
Proposition
Si
est une BON de l’EVE
alors :
(A) ![Rendered by QuickLaTeX.com \[\forall x\in E,\thinspace x=\sum_{i=1}^{n}\left(x\mid e_{i}\right)e_{i}\]](https://math-os.com/wp-content/ql-cache/quicklatex.com-e04b65f2b60dad70748dff8cd440a86d_l3.png)
En effet, on peut décomposer tout vecteur
dans la base
sous la forme :
![Rendered by QuickLaTeX.com \[x=\sum_{k=1}^{n}x_{k}e_{k}\]](https://math-os.com/wp-content/ql-cache/quicklatex.com-c49a165485e71cafc46a9b99200b8145_l3.png)
![Rendered by QuickLaTeX.com \[\left(x\mid e_{i}\right)=\sum_{k=1}^{n}x_{k}\left(e_{k}\mid e_{i}\right)=\sum_{k=1}^{n}x_{k}\delta_{k,i}=x_{i}\]](https://math-os.com/wp-content/ql-cache/quicklatex.com-e946b48ac8d1d8c3e6be8ccbefc840c2_l3.png)
Corollaire
Si
est une BON de l’EVE
alors :
(B) ![Rendered by QuickLaTeX.com \[\forall x\in E,\thinspace\left\Vert x\right\Vert ^{2}=\sum_{i=1}^{n}\left(x\mid e_{i}\right)^{2}\]](https://math-os.com/wp-content/ql-cache/quicklatex.com-7664d1c92c5724489e9bfe8f191a3fed_l3.png)
En partant de l’assertion (A) et en effectuant le produit scalaire de chaque membre par
on obtient directement (B). On peut aussi utiliser la formule de Pythagore (le carré de la norme d’une somme de vecteurs deux à deux orthogonaux est égale à la somme des carrés des normes de ces vecteurs); pour tout
:
![Rendered by QuickLaTeX.com \[\left\Vert x\right\Vert ^{2}=\left\Vert \sum_{i=1}^{n}\left(x\mid e_{i}\right)e_{i}\right\Vert ^{2}=\sum_{i=1}^{n}\left(x\mid e_{i}\right)^{2}\left\Vert e_{i}\right\Vert ^{2}=\sum_{i=1}^{n}\left(x\mid e_{i}\right)^{2}\]](https://math-os.com/wp-content/ql-cache/quicklatex.com-83cd7c260a018c12e4cefc8415791c36_l3.png)
A présent, étant donné un EPHR
et une famille
de vecteurs de
on va s’interroger sur les réciproques de la proposition et de son corollaire :
- Les assertions (A) ou (B) suffisent-elles pour entraîner que
est une BON de
? - Et si tel n’est pas le cas, que peut-on supposer de plus pour atteindre cette conclusion ?
1 – Réciproque de (A)
Proposition
Soit
un EVE de dimension
et soit
une famille de vecteurs de
vérifiant :
![Rendered by QuickLaTeX.com \[\forall x\in E,\,x=\sum_{i=1}^{n}\,\left(x\mid e_{i}\right)e_{i}\]](https://math-os.com/wp-content/ql-cache/quicklatex.com-cb1913321653f2426a8421b3bf8ca6f3_l3.png)
Par hypothèse, tout vecteur de
est combinaison linéaire de
Autrement dit, la famille
est génératrice de
Mais comme
c’est en fait une base de ![]()
En remplaçant
par
on obtient pour tout
:
![Rendered by QuickLaTeX.com \[e_{j}=\sum_{i=1}^{n}\left(e_{j}\mid e_{i}\right)e_{i}\]](https://math-os.com/wp-content/ql-cache/quicklatex.com-05749fa068c3a34e9055cef454825daa_l3.png)
![Rendered by QuickLaTeX.com \[\left(\left\Vert e_{j}\right\Vert ^{2}-1\right)e_{j}+\sum_{{1\leqslant i\leqslant n\atop i\neq j}}\left(e_{j}\mid e_{i}\right)e_{i}=0_{E}\]](https://math-os.com/wp-content/ql-cache/quicklatex.com-b58496b407d25d4f9098ab7cc8eecfbe_l3.png)
![]()
Remarque
Dans la proposition, on a supposé que
était de dimension
et que la famille était constituée de
vecteurs … le même entier n. Sans cette hypothèse, on peut toujours affirmer que
est génératrice de
(et donc que
est de dimension finie), mais
n’a aucune raison d’être libre. Un exemple de cette situation est obtenu en prenant
le produit scalaire étant alors simplement la multiplication des nombres réels. Si l’on pose :
![]()
![Rendered by QuickLaTeX.com \[x=\left(x\cdot\dfrac{1}{2}\right)\dfrac{1}{2}+\left(x\cdot\dfrac{\sqrt{3}}{2}\right)\dfrac{\sqrt{3}}{2}\]](https://math-os.com/wp-content/ql-cache/quicklatex.com-543ed66049a30650a1cd2e9af7a3f012_l3.png)
Ajoutons qu’on a aussi, pour tout
:
![Rendered by QuickLaTeX.com \[x^{2}=\left(x\cdot\dfrac{1}{2}\right)^{2}+\left(x\cdot\dfrac{\sqrt{3}}{2}\right)^{2}\]](https://math-os.com/wp-content/ql-cache/quicklatex.com-ec9e0d5ff77d900459bc38866890a3f3_l3.png)
2 – Réciproque (B) sans hypothèse de dimension
Proposition
Soient
un EPHR (aucune hypothèse de dimension) et
une famille de vecteurs de
On suppose que :
![Rendered by QuickLaTeX.com \[\forall x\in E,\,\left\Vert x\right\Vert ^{2}=\sum_{i=1}^{n}\,\left(x\mid e_{i}\right)^{2}\]](https://math-os.com/wp-content/ql-cache/quicklatex.com-64dd39bed32e0f4f7c2f40c071f75452_l3.png)
![]()
Alors
est une BON de ![]()
Soit
Par hypothèse :
![Rendered by QuickLaTeX.com \[\left\Vert e_{j}\right\Vert ^{2}=\sum_{i=1}^{n}\,\left(e_{j}\mid e_{i}\right)^{2}=\left\Vert e_{j}\right\Vert ^{4}+\sum_{{1\leqslant i\leqslant n\atop i\neq j}}\,\left(e_{j}\mid e_{i}\right)^{2}\geqslant\left\Vert e_{j}\right\Vert ^{4}\]](https://math-os.com/wp-content/ql-cache/quicklatex.com-02cd2f609335148b6c6ca68146055458_l3.png)
![Rendered by QuickLaTeX.com \[\sum_{{1\leqslant i\leqslant n\atop i\neq j}}\,\left(e_{j}\mid e_{i}\right)^{2}=0\]](https://math-os.com/wp-content/ql-cache/quicklatex.com-6773226006540848e45de544e9a19ea3_l3.png)
La famille
est donc orthonormale (et, en particulier, libre).
On peut montrer qu’elle est aussi génératrice de
de deux manières :
Méthode 1
Notons
le sev de
engendré par
Pour tout
:
![Rendered by QuickLaTeX.com \[\left\Vert x\right\Vert ^{2}=\sum_{i=1}^{n}\,\left(x\mid e_{i}\right)^{2}=0\]](https://math-os.com/wp-content/ql-cache/quicklatex.com-1b8e7163b6dee3719916afc03066e230_l3.png)
Méthode 2
Soit
On souhaite montrer que
est combinaison linéaire de
Si tel est le cas, on aura nécessairement
puisque
est une famille orthonormale. Il est donc naturel d’essayer de prouver que le vecteur
est nul. En développant par bilinéarité et d’après la formule de Pythagore :

On retrouve le fait que ➣ En conclusion,
est une BON de ![]()
Remarque
L’espace
n’était pas supposé de dimension finie, mais il s’avère qu’il est de dimension n.
3 – Réciproque de (B), via matrice de Gram
Proposition
Soient
un EVE de dimension n et
une famille de vecteurs de
telle que :
![Rendered by QuickLaTeX.com \[\forall x\in E,\,\left\Vert x\right\Vert ^{2}=\sum_{i=1}^{n}\,\left(x\mid e_{i}\right)^{2}\]](https://math-os.com/wp-content/ql-cache/quicklatex.com-64dd39bed32e0f4f7c2f40c071f75452_l3.png)
On sait déjà, en reprenant par exemple la méthode 1 de la section précédente, que
est une famille génératrice et donc une base de
Introduisons la matrice :
![]()
En utilisant une formule de polarisation, on voit que pour tout
:

![Rendered by QuickLaTeX.com \[\forall\left(i,j\right)\in\left\llbracket 1,n\right\rrbracket ^{2},\;\left(e_{i}\mid e_{j}\right)=\sum_{k=1}^{n}\,\left(e_{i}\mid e_{k}\right)\,\left(e_{j}\mid e_{k}\right)\]](https://math-os.com/wp-content/ql-cache/quicklatex.com-29e929d537ef88ddb4211497d07786f4_l3.png)
Soit donc
tel que
c’est-à-dire tel que :
![Rendered by QuickLaTeX.com \[\forall i\in\left\llbracket 1,n\right\rrbracket ,\thinspace\sum_{j=1}^{n}\left(e_{i}\mid e_{j}\right)x_{j}=0\]](https://math-os.com/wp-content/ql-cache/quicklatex.com-216c7e826d26ac579fc2c624b16aa862_l3.png)
cette condition devient : ![]()
Remarque
Autre point de vue :
est la matrice de Gram associée à
qui est une famille libre. Donc
est (symétrique) définie positive et, en particulier, inversible.
4 – Réciproque de (B), via Cauchy-Schwarz
Proposition
Soient
un EVE de dimension n et
une famille de vecteurs de
telle que :
![Rendered by QuickLaTeX.com \[\forall x\in E,\,\left\Vert x\right\Vert ^{2}=\sum_{i=1}^{n}\,\left(x\mid e_{i}\right)^{2}\]](https://math-os.com/wp-content/ql-cache/quicklatex.com-64dd39bed32e0f4f7c2f40c071f75452_l3.png)
… mais par un autre chemin.
Le démarrage de la preuve est le même que précedemment : la famille
est nécessairement une base de
puisque d’une part, l’orthogonal du sous-espace qu’elle engendre est nul et, d’autre part, elle comporte
vecteurs avec ![]()
Ensuite, comme au début de la section 2, on voit que pour tout
: ![]()
Il reste à prouver les inégalités en sens inverse, pour conclure (comme au début de la section 2) que
est une BON de ![]()
Une bonne idée est de faire intervenir l’inégalité de Cauchy-Schwarz (ICS). Rappelons que, pour tout couple
de vecteurs de
:
![]()
![]()
Or l’existence d’un tel
est assurée : il suffit de considérer l’hyperplan
et de choisir
non nul dans la droite vectorielle ![]()


Bonjour Monsieur,
Merci pour ce bel article, qui peut-être ouvrira une séquence estivale 🙂
Bien à vous,
Fabrice