Comment calculer une dimension ?

Cet article s’adresse à celles et ceux qui s’intéressent aux questions d’algèbre linéaire et donc – entre autres – aux étudiants des deux premières années d’enseignement supérieur scientifique.

Dans un cours d’algèbre linéaire, on aborde notamment la question des espaces vectoriels de dimension finie. On y explique que si \mathbb{K} est un corps (le plus souvent un sous-corps de \mathbb{C}) et si E est un \mathbb{K}-espace vectoriel possédant une famille finie et génératrice de E, alors on peut trouver une telle famille qui soit de plus libre, et qui constitue donc une base de E.

En outre, toutes les bases de E sont composées d’un même nombre de vecteurs. Cet entier est appelé la dimension de E et noté \dim\left(E\right).

Cette construction théorique n’est pas traitée ici, mais vous pouvez en découvrir tous les détails en visionnant cette vidéo et les suivantes.

Ce texte essaie de rassembler les principales méthodes qui permettent, en pratique, de calculer la dimension d’un espace vectoriel. Chacune de ces méthodes est illustrée d’exemples. Bonne lecture 🙂

1 – Intuitivement, la dimension … c’est quoi ?

De façon naïve, la dimension d’un espace vectoriel est le « nombre de degrés de liberté » dont on dispose pour s’y déplacer.

Si l’espace en question est une droite, on repère la position d’un point par son abscisse, après avoir choisi une origine et un vecteur unité. S’il s’agit d’un plan, deux nombres sont nécessaires : une abscisse et une ordonnée.

Dans l’espace usuel, on peut repérer la position d’un point par trois nombres : une abscisse X, une ordonnée Y et une côte Z.

Illustration dynamique 1

Modifier la position de l’observateur en pressant SHIFT →↑↓←.

Zoomer / dézoomer en utilisant les touches P / M.

Les sliders contrôlent les coordonnées cartésiennes du centre de la petite sphère.

Mais ce n’est pas la seule façon de s’y prendre. Par exemple, la position d’un point au voisinage de la terre peut être repérée par une latitude, une longitude et une altitude : là encore, trois nombres.

Illustration dynamique 2

Modifier la position de l’observateur en pressant SHIFT →↑↓←.

Zoomer / dézoomer en utilisant les touches P / M.

Les sliders contrôlent les coordonnées sphériques du centre de la petite sphère.

D’ailleurs, ce concept s’étend bien au-delà des espaces vectoriels (ou affines). Une sphère, par exemple, doit être considérée comme un espace de dimension 2 : par temps calme, la surface d’un océan ressemble (comme deux gouttes d’eau … il fallait oser) à un plan; tout au moins à une échelle appropriée.

Ces images mentales peuvent aider à se faire une idée intuitive de la notion de dimension.

Revenons maintenant au cadre formel des espaces vectoriels.

2 – Compter les vecteurs d’une base

Règle A

Soient E un \mathbb{K}-espace vectoriel et n\in\mathbb{N}^\star.

Si \left(e_{1},\cdots,e_{n}\right) est une base de E, alors \dim\left(E\right)=n.

Ceci provient simplement de la définition de \dim\left(E\right), mentionnée dans introduction.

Voici quelques exemples d’utilisation de cette règle.

Exemple A-1

Pour tout n\in\mathbb{N}^{\star} :

    \[\boxed{\dim\left(\mathbb{K}^{n}\right)=n}\]


En effet, on voit aisément (cf. détail ci-dessous) qu’en notant pour tout i\in\left\llbracket 1,n\right\rrbracket :

la famille \left(e_{1},\cdots,e_{n}\right) est une base de \mathbb{K}^{n} (officiellement appelée la base canonique de \mathbb{K}^{n}).

– Détail –

Choisissons n=3. C’est suffisant pour comprendre. Tout vecteur de \mathbb{K}^{3} s’écrit sous la forme :

    \begin{equation*}\begin{split}\left(x,y,z\right) & = \left(x,0,0\right)+\left(0,y,0\right)+\left(0,0,z\right)\\& = x\left(1,0,0\right)+y\left(0,1,0\right)+z\left(0,0,1\right)\end{split}\end{equation*}


ce qui prouve que la famille :

    \[\beta=\left(\left(1,0,0\right),\left(0,1,0\right),\left(0,0,1\right)\right)\]

est génératrice de \mathbb{K}^{3}.

Elle est de plus libre; en effet, si x,y,z sont trois scalaires tels que :

    \[x\left(1,0,0\right)+y\left(0,1,0\right)+z\left(0,0,1\right)=\left(0,0,0\right)\]

alors, à l’évidence, x=y=z=0.

Finalement, \beta est une base de \mathbb{K}^{3}. La généralisation à n quelconque est immédiate.

Exemple A-2

Considérons deux réels a,b ainsi que l’ensemble :

    \[F=\left\{ \left(x,y,z\right)\in\mathbb{R}^{3},\thinspace z=ax+by\right\}\]

qui est un sous-espace vectoriel de \mathbb{R}^{3} (en effet, F contient visiblement le triplet nul et est stable par combinaison linéaire).

Les vecteurs de F sont les triplets de la forme :

    \begin{equation*}\begin{split}\left(x,y,ax+by\right) & = \left(x,0,ax\right)+\left(0,y,by\right)\\& = x\left(1,0,a\right)+y\left(0,1,b\right)\end{split}\end{equation*}

Les vecteurs \left(1,0,a\right) et \left(0,1,b\right) appartiennent à F et tout vecteur de F est combinaison linéaire de ces deux-là. La famille \left(\left(1,0,a\right),\left(0,1,b\right)\right) est donc génératrice de F. Comme elle libre (évident), c’est une base de F et donc :

    \[\boxed{\dim\left(F\right)=2}\]

Cet exemple peut se généraliser de la manière suivante. Si n\in\mathbb{N}^{\star} et si \lambda_{1},\cdots,\lambda_{n}\in\mathbb{K} ne sont pas simultanément nuls, alors l’ensemble :

    \[H=\left\{ \left(x_{1},\cdots,x_{n}\right)\in\mathbb{K}^{n};\thinspace\sum_{k=1}^{n}\lambda_{k}x_{k}=0\right\}\]

est un sous-espace de \mathbb{K}^{n} et :

    \[\boxed{\dim\left(H\right)=n-1}\]

On peut effet construire une base de H formée de n-1 vecteurs. Il est toutefois beaucoup plus simple de voir H comme le noyau de la forme linéaire non nulle

    \[\mathbb{K}^{n}\rightarrow\mathbb{K},\thinspace\left(x_{1},\cdots,x_{n}\right)\mapsto\sum_{k=1}^{n}\lambda_{k}x_{k}\]

et d’invoquer la formule du rang (voir section 6).

Exemple A-3

Etant donnés deux entiers n,p\geqslant1, l’ensemble \mathcal{M}_{n,p}\left(\mathbb{K}\right) des matrices rectangulaires à n lignes et p colonnes et à termes dans \mathbb{K} est un \mathbb{K}-espace vectoriel.

Notons E_{r,s} la matrice de format n\times p dont les termes sont tous nuls, à l’exception de celui situé à l’intersection de la ligne r et de la colonne s, qui vaut 1.

Il est facile de voir que la famille \left(E_{r,s}\right)_{{1\leqslant r\leqslant p\atop 1\leqslant s\leqslant n}} (ordonnée par exemple selon l’ordre lexicographique sur les couples d’indices) est une base de \mathcal{M}_{n,p}\left(\mathbb{K}\right) (c’est la base canonique). En conséquence :

    \[\boxed{\dim\left(\mathcal{M}_{n,p}\left(\mathbb{K}\right)\right)=np}\]

Cet exemple raconte donc essentiellement la même histoire que l’exemple A-1.

Exemple A-4

Soit n\in\mathbb{N}. Dans l’espace \mathbb{K}^{\mathbb{N}} des suites à termes dans \mathbb{K}, considérons le sous-espace E_{n} des suites \left(a_{k}\right)_{k\in\mathbb{N}} telles que :

    \[ \forall k>n,\:a_{k}=0\]

En clair, E_{n} est constitué des suites dont tous les termes au-delà du rang n sont nuls (vous aurez probablement reconnu l’espace des polynômes à coefficients dans \mathbb{K} dont le degré inférieur ou égal à n. Autrement dit : E_{n}=\mathbb{K}_{n}\left[X\right], mais c’est sans importance ici).

Posons, pour tout j\in\left\llbracket 0,n\right\rrbracket :

    \[u_{j}=\left(\delta_{j,k}\right)_{k\in\mathbb{N}} \]

où l’on pose

    \[\delta_{j,k}=\left\{\begin{matrix}1 & \text{si } j=k\\ 0 & \text{sinon}\end{matrix}\right.\]

par définition (symbole de Kronecker).

En d’autres termes, u_{j} est la suite de scalaires dont tous les termes sont nuls, à l’exception du j-ème qui vaut 1.

La famille \left(u_{0},\cdots,u_{n}\right) est alors une base de E_{n} et, de ce fait :

    \[\boxed{\dim\left(E_{n}\right)=n+1}\]

3 – Dimension d’un produit cartésien

Considérons deux \mathbb{K}-espaces vectoriels E,F. L’ensemble des couples \left(x,y\right) avec x\in E et y\in F est noté E\times F. C’est le produit cartésien de E par F.

On munit cet ensemble d’une structure de \mathbb{K}-espace vectoriel, en décrétant que :

  • pour tout \left(x,y\right)\in E\times F et tout \left(x',y'\right)\in E\times F :

    (S)   \[\left(x,y\right)+\left(x',y'\right)=\left(x+x',y+y'\right)\]

  • pour tout \lambda\in\mathbb{K} et tout \left(x,y\right)\in E\times F :

    (P)   \[\lambda\left(x,y\right)=\left(\lambda x,\thinspace\lambda y\right)\]

Précisons que le vecteur nul de E\times F est le couple \left(0_{E},0_{F}\right).

La notation utilisée dans la formule (S) est abusive, car le symbole + est utilisé pour désigner trois opérations a priori distinctes :

  • l’addition dans E,
  • l’addition dans F,
  • l’addition dans E\times F

Il est essentiel d’en être conscient(e). Sans compter que, dans ce contexte, le symbole + désignera aussi l’addition dans \mathbb{K}

Et l’on pourrait formuler une remarque similaire pour la formule (P).

Cela dit, énonçons la :

Règle B

Si E,F sont de dimensions finies, alors E\times F aussi et :

    \[\dim\left(E\times F\right)=\dim\left(E\right)+\dim\left(F\right)\]

Preuve (cliquer pour déplier / replier)

Notons p=\dim\left(E\right) et n=\dim\left(F\right). Si l’on considère une base \left(e_{1},\cdots,e_{p}\right) de E ainsi qu’une base \left(f_{1},\cdots,f_{n}\right) de F, alors la famille :

    \[B=\left(\left(e_{1},0_{F}\right),\cdots,\left(e_{p},0_{F}\right),\left(0_{E},f_{1}\right),\cdots,\left(0_{E},f_{n}\right)\right)\]

est une base de E\times F.

On vérifie en effet que B est libre et génératrice de E\times F :


LIBRE car si \lambda_{1},\cdots,\lambda_{p},\mu_{1},\cdots,\mu_{n} sont des scalaires vérifiant :

    \[\lambda_{1}\left(e_{1},0_{F}\right)+\cdots+\lambda_{p}\left(e_{p},0_{F}\right)+\mu_{1}\left(0_{E},f_{1}\right)+\cdots+\mu_{n}\left(0_{E},f_{n}\right)=\left(0_{E},0_{F}\right)\]

alors :

    \[\left(\sum_{i=1}^{p}\lambda_{i}e_{i},\thinspace\sum_{j=1}^{n}\mu_{j}f_{j}\right)=\left(0_{E},0_{F}\right)\]

c’est-à-dire :

    \[\sum_{i=1}^{p}\lambda_{i}e_{i}=0_{E}\qquad\text{et}\qquad\sum_{j=1}^{n}\mu_{j}f_{j}=0_{F}\]

Mais comme les familles \left(e_{1},\cdots,e_{p}\right) et \left(f_{1},\cdots,f_{n}\right) sont libres, il s’ensuit que :

    \[\forall i\in\left\llbracket 1,p\right\rrbracket ,\thinspace\lambda_{i}=0\qquad\text{et}\qquad\forall j\in\left\llbracket 1,n\right\rrbracket ,\thinspace\mu_{j}=0\]

GENERATRICE de E\times F car tout vecteur de E\times F se présente sous la forme d’un couple \left(x,y\right) avec x\in E et y\in F, or x se décompose dans la base \left(e_{1},\cdots,e_{p}\right) et y se décompose dans la base \left(f_{1},\cdots,f_{n}\right) :

    \[x=\sum_{i=1}^{p}x_{i}e_{i}\qquad\text{et}\qquad y=\sum_{j=1}^{n}y_{j}f_{j}\]

d’où :

    \begin{equation*}\begin{split}\left(x,y\right) & = \left(x,\thinspace0_{F}\right)+\left(0_{E},\thinspace y\right)\\& = \left(\sum_{i=1}^{p}x_{i}e_{i},\thinspace0_{F}\right)+\left(0_{E},\thinspace\sum_{j=1}^{n}y_{j}f_{j}\right)\\& = \sum_{i=1}^{p}x_{i}\left(e_{i},0_{F}\right)+\sum_{j=1}^{n}y_{j}\left(0_{E},f_{j}\right) \end{split}\end{equation*}

Remarque

Il en résulte par récurrence que si r\geqslant2 et si E_{1},\cdots,E_{r} sont des \mathbb{K}-espaces vectoriels de dimensions finies, alors il en va de même pour {\displaystyle \prod_{k=1}^{r}E_{k}} et :

    \[\boxed{\dim\left(\prod_{k=1}^{r}E_{k}\right)=\sum_{k=1}^{r}\dim\left(E_{k}\right)}\]

Pour l’hérédité, on observe que \displaystyle{\prod_{k=1}^{r+1}E_k} est isomorphe (attention : pas égal) à \displaystyle{\left(\prod_{k=1}^rE_k\right)\times E_{r+1}}

Exemple B

L’espace \mathcal{M}_{2,3}\left(\mathbb{R}\right)\times\mathbb{R}^{4} est de dimension 2\times3+4=10.

4 – Utilisation d’un isomorphisme

Règle C

Soient E,F deux \mathbb{K}-espaces vectoriels isomorphes.

Si l’un d’eux est de dimension finie, alors l’autre aussi et leurs dimensions sont égales.

Ce résultat découle du double-lemme suivant :

Double-Lemme

Soient E,F deux \mathbb{K}-espaces vectoriels et soit u\in\mathcal{L}\left(E,F\right).

  • Si u est injective, alors u transforme toute famille libre de vecteurs de E en une famille libre de vecteurs de F.
  • Si u est surjective, alors u transforme tout famille génératrice de E en une famille génératrice de F.
Preuve du double lemme (cliquer pour déployer)

Pour le premier point …

Considérons une famille libre \left(x_{1},\cdots,x_{r}\right) de vecteurs de E et des scalaires \lambda_{1},\cdots,\lambda_{r} tels que :

    \[\sum_{i=1}^{r}\lambda_{i}\thinspace u\left(x_{i}\right)=0_{F}\]

Par linéarité de u, on voit que :

    \[\sum_{i=1}^{r}\lambda_{i}\thinspace x_{i}\in\ker\left(u\right)\]

Et comme u est injective, ceci impose :

    \[\sum_{i=1}^{r}\lambda_{i}x_{i}=0_{E}\]

Enfin, la famille \left(x_{1},\cdots,x_{r}\right) étant libre par hypothèse, on en déduit que \lambda_{i}=0 pour tout i\in\left\llbracket 1,r\right\rrbracket . Ceci montre que la famille \left(u\left(x_{1}\right),\cdots,u\left(x_{r}\right)\right) est libre.

Pour le second point …

Donnons-nous une famille \left(e_{1},\cdots,e_{s}\right) génératrice de E et soit y\in F. Comme u est surjective, il existe x\in E tel que y=u\left(x\right). On peut alors exprimer x sous la forme d’une combinaison linéaire des e_{i} :

    \[\exists\left(\alpha_{1},\cdots,\alpha_{s}\right)\in\mathbb{K}^{s};\thinspace x=\sum_{i=1}^{s}\alpha_{i}e_{i}\]

et donc, par linéarité de u :

    \[y=\sum_{i=1}^{s}\alpha_{i}\thinspace u\left(e_{i}\right)\]

Ceci prouve que la famille \left(u\left(e_{1}\right),\cdots,u\left(e_{s}\right)\right) est génératrice de F.

Maintenant que notre double-lemme est établi, la règle C devient claire. En effet, si \varphi:E\rightarrow F est un isomorphisme et si E est de dimension n, alors une base \left(e_{1},\cdots,e_{n}\right) de E est transformée par \varphi en une famille libre (parce que \varphi est une injection linéaire) et aussi en une famille génératrice de F (parce que \varphi est une surjection linéaire).

Moralité, la famille \left(\varphi\left(e_{1}\right),\cdots,\varphi\left(e_{n}\right)\right) est une base de F et donc (cf. règle A) : \dim\left(F\right)=n.

Ce mécanisme sera utilisé dans chacune des trois sections suivantes.

Mais donnons-en déjà une application significative.

Exemple C-1

Etant donné a,b\in\mathbb{K}, intéressons-nous à l’ensemble E des suites u à termes dans \mathbb{K} qui vérifient la relation de récurrence :

(\star)   \[\boxed{\forall n\in\mathbb{N},\thinspace u_{n+2}+a\thinspace u_{n+1}+b\thinspace u_{n}=0}\]

Nous allons prouver que E est un \mathbb{K}-espace vectoriel de dimension 2.

Pour cela, commençons par observer que si \delta désigne l’endomorphisme de décalage (le shift, comme on dit outre-manche), c’est-à-dire l’application

    \[\delta:\mathbb{K}^{\mathbb{N}}\rightarrow\mathbb{K}^{\mathbb{N}},\:\left(u_{0},u_{1},\cdots\right)\mapsto\left(u_{1},u_{2},\cdots\right)\]

alors :

    \[E=\ker\left(\delta^{2}+a\thinspace\delta+b\thinspace id_{\mathbb{K}^{\mathbb{N}}}\right)\]

ce qui prouve notamment que E est un sous-espace vectoriel de \mathbb{K}^{\mathbb{N}}.

Maintenant, considérons l’application

    \[\Phi:E\rightarrow\mathbb{K}^{2},\thinspace u\mapsto\left(u_{0},u_{1}\right)\]

\Phi associe, à toute suite u vérifiant \left(\star\right), le couple de ses deux premiers termes.

Il est facile (non détaillé) de prouver que \Phi est linéaire et bijective. Il en résulte aussitôt que :

    \[\boxed{\dim\left(E\right)=2}\]

Remarque

Cet exemple se généralise. Si r\in\mathbb{N}^{\star} et si \left(a_{0},\cdots,a_{r-1}\right)\in\mathbb{K}^{r}, alors l’espace des suites u\in\mathbb{K}^{\mathbb{N}} vérifiant la relation

    \[\forall n\in\mathbb{N},\thinspace u_{n+r}+\sum_{i=0}^{r-1}a_{i}\thinspace u_{n+i}=0\]

est de dimension r. Ceci est moralement assez banal : connaître une telle suite équivaut à se donner ses r premiers termes (et donc, on dispose de r degrés de liberté pour se  » déplacer «  dans cet espace).

5 – Dimension d’une somme

Rappelons que si E est un \mathbb{K}-espace vectoriel et si F,G sont deux sous-espaces vectoriels de E, alors F+G désigne l’ensemble des vecteurs de E qui sont la somme d’un vecteur de F et d’un vecteur de G :

    \[F+G=\left\{ x+y;\thinspace x\in F\text{ et }y\in G\right\}\]

En outre, si tout vecteur de F+G s’exprime d’une seule manière sous cette forme, la somme F+G est qualifiée de directe. On la note alors F\oplus G.

Les notations F+G et F\oplus G désignent donc le même ensemble, mais la seconde indique qu’une condition supplémentaire (jeu de mots) d’unicité est remplie !

Le but de cette section est d’obtenir une formule pour \dim\left(F+G\right), lorsque F et G sont de dimensions finies (il n’est pas utile de supposer que la dimension de E est finie).

Procédons en deux temps.

1ère étape

Supposons la somme F+G directe. Sous cette hypothèse, l’application

    \[\varphi:F\times G\rightarrow F\oplus G,\thinspace\left(f,g\right)\mapsto f+g\]

est un isomorphisme.

Détail

Linéarité

Soient \left(x,y\right)\in F\times G, \left(x',y'\right)\in F\times G et \lambda\in\mathbb{K}. Alors :

    \begin{equation*}\begin{split}\varphi\left(\lambda\left(x,y\right)+\left(x',y'\right)\right) & = \varphi\left(\lambda x+x',\lambda y+y'\right)\\ & = \left(\lambda x+x'\right)+\left(\lambda y+y'\right)\\& = \lambda\left(x+y\right)+\left(x'+y'\right)\\& = \lambda\thinspace\varphi\left(x,y\right)+\varphi\left(x',y'\right)\end{split}\end{equation*}

Bijectivité

Tout vecteur de F\oplus G peut, par définition, s’écrire de façon unique sous la forme x+y avec x\in F et y\in G, autrement dit tout élément de l’ensemble d’arrivée de \varphi possède un unique antécédent. C’est la définition d’une bijection.

Ceci permet d’appliquer la règle B et la règle C : comme F\times G est de dimension finie, alors F\oplus G aussi et les dimensions sont les mêmes. Concluons :

    \[\boxed{\dim\left(F\oplus G\right)=\dim\left(F\right)+\dim\left(G\right)}\]

2ème étape

Dans le cas général, l’idée consiste à se ramener à une somme directe, grâce au lemme suivant.

Lemme

Soient F,G deux sous-espaces vectoriels de E.

Etant donné un supplémentaire S de F\cap G dans G :

    \[F+G=F\oplus S\]

Preuve (cliquer pour déplier / replier)

Si x\in F+G, alors il existe \left(f,g\right)\in F\times G tel que x=f+g. Puis comme G=\left(F\cap G\right)\oplus S, il existe i\in F\cap G et s\in S tels que g=i+s. De ce fait :

    \[x=\left(f+i\right)+s\]

Ceci prouve que F+G\subset F+S. L’inclusion réciproque est évidente puisque S\subset G.

Pour finir, la somme F+S est directe puisque, comme S\subset G :

    \[F\cap S=F\cap\left( S\cap G\right)=\subset\left(F\cap G\right)\cap S=\left\{ 0_{E}\right\}\]

On en déduit la :

Règle D (formule de Grassmann)

Soit E un \mathbb{K}-espace vectoriel et soient F,G des sous-espaces vectoriels de E, de dimensions finies. Alors :

    \[\boxed{\dim\left(F+G\right)=\dim\left(F\right)+\dim\left(G\right)-\dim\left(F\cap G\right)}\]

H.G. GRASSMANN (1809-1877)

Remarque

Cette formule évoque celle donnant le cardinal de l’union de deux ensembles finis. Mais la comparaison s’arrête là …

En effet, étant donnés trois sous-espaces F,G,H de dimensions finies, la formule :

    \begin{equation*}\begin{split}\dim(F+G+H) =& \dim(F)+\dim(G)+\dim(H)\\& - \left(\dim(F\cap G)+\dim(F\cap H)+\dim(G\cap H)\right)\\& +\dim(F\cap G\cap H)\end{split}\end{equation*}

est en général FAUSSE !

Comme contre-exemple, on peut proposer, pour E=\mathbb{R}^2 :

    \[F=\mathbb{R}(1,0)\qquad G=\mathbb{R}(0,1)\qquad H=\mathbb{R}(1,1)\]

Exemple D-1

Considérons un espace E de dimension finie n\geqslant2 et deux hyperplans A et B de E (ce sont simplement des sous-espaces vectoriels de dimension n-1).

Calculons la dimension de A\cap B, en distinguant deux cas.

cas 1 : \boxed{A=B}

Il est évident que \dim\left(A\cap B\right)=n-1 puisque A\cap B=A.

cas 2 : \boxed{A\neq B}

Aucun des deux hyperplans n’est inclus dans l’autre (une inclusion entraînerait, vue l’égalité des dimensions, que les deux hyperplans sont confondus). Soit b\in B tel que b\notin A. La somme A+\mathbb{K}b est alors directe (puisque A\cap\mathbb{K}b=\left\{ 0_{E}\right\} ) et sa dimension est donc :

    \[\dim\left(A+\mathbb{K}b\right)=\dim\left(A\right)+\dim\left(\mathbb{K}b\right)=\left(n-1\right)+1=n\]

Autrement dit : A\oplus\mathbb{K}b=E. Mais alors A+B=E (puisque A+B\supset A\oplus\mathbb{K}b).

On applique maintenant la formule de Grassmann :

    \[\dim\left(A\cap B\right)=\dim\left(A\right)+\dim\left(A\right)-\dim\left(A+B\right)\]

c’est-à-dire :

    \begin{equation*}\begin{split}\dim\left(A\cap B\right) & = \left(n-1\right)+\left(n-1\right)-n\\ & = n-2 \end{split}\end{equation*}

En conclusion, si A et B sont deux hyperplans d’un espace de dimension n\geqslant2 alors :

    \[\boxed{\dim\left(A\cap B\right)=\left\{ \begin{array}{cc}n-1 & \text{si }A=B\\n-2 & \text{sinon}\end{array}\right.}\]

6 – La formule du rang

Considérons deux \mathbb{K}-espaces vectoriels E,F et une application linéaire u\in\mathcal{L}\left(E,F\right).

Règle E (théorème du rang)

Si E est de dimension finie alors \text{Im}\left(u\right) est aussi de dimension finie et :

    \[\boxed{\dim\left(E\right)=\dim\left(\ker\left(u\right)\right)+\dim\left(\text{Im}\left(u\right)\right)}\]

L’entier \dim\left(\text{Im}\left(u\right)\right) est appelé le rang de u; on le note \text{rg}\left(u\right).

L’égalité ci-dessus porte le nom de formule du rang.

Ce résultat important est démontré dans cet article, auquel vous pouvez vous reporter, si nécessaire.

Exemple E-1

Considérons l’application linéaire :

    \[\begin{array}{cccc}\varphi: & \mathbb{R}^{4} & \rightarrow & \mathbb{R}^{3}\\& \left(x,y,z,t\right) & \mapsto & \left(x+t,y-z,x+y-z+t\right)\end{array}\]

Son noyau est :

    \[\ker\left(\varphi\right)=\left\{ \left(x,y,z,t\right)\in\mathbb{R}^{4};\thinspace x+t=y-z=x+y-z+t=0\right\}\]

La condition x+y-z+t=0 étant conséquence des deux autres :

    \begin{equation*}\begin{split}\ker\left(\varphi\right) & = \left\{ \left(x,y,z,t\right)\in\mathbb{R}^{4};\thinspace x+t=y-z=0\right\} \\ & = \left\{ \left(x,y,y,-x\right);\thinspace\left(x,y\right)\in\mathbb{R}^{2}\right\} \\ & = \mathbb{R}\left(1,0,0,-1\right)\oplus\mathbb{R}\left(0,1,1,0\right)\end{split}\end{equation*}


et donc (somme directe de deux droites vectorielle : cf. section 5) :

    \[\dim\left(\ker\left(\varphi\right)\right)=2\]

puis, d’après la formule du rang :

    \[\text{rg}\left(\varphi\right)=\dim\left(\mathbb{R}^{4}\right)-2=2\]

On peut en déduire que \varphi n’est pas surjective : dans le cas contraire, \text{rg}\left(\varphi\right) serait égal à la dimension de l’espace d’arrivée, c’est-à-dire 3.

Exemple E-2

Considérons un \mathbb{R}-espace vectoriel E de dimension n\geqslant2 et cherchons la valeur maximale du rang d’un endomorphisme f\in\mathcal{L}\left(E\right) vérifiant f^{2}=0.

Analysons la situation … Si f est un tel endomorphisme, alors \text{Im}\left(f\right)\subset\ker\left(f\right) donc, en passant aux dimensions :

    \[\text{rg}\left(f\right)\leqslant\dim\left(\ker\left(f\right)\right)\]

c’est-à-dire, d’après la formule du rang :

    \[\text{rg}\left(f\right)\leqslant n-\text{rg}\left(f\right)\]

Il en résulte que :

(\spadesuit)   \[\text{rg}\left(f\right)\leqslant\left\lfloor \frac{n}{2}\right\rfloor \]

\left\lfloor X\right\rfloor désigne la partie entière d’un réel X.

Si l’on construit un endomorphisme f vérifiant f^{2}=0 et pour lequel \left(\spadesuit\right) est une égalité, on aura fini. Et c’est possible …

Soit \beta=\left(e_{1},\cdots,e_{n}\right) une base de E. Définissons f par sa matrice M dans \beta :

➤ Si n est pair, n=2p :

    \[M=\text{diag}\left(\left[\begin{array}{cc}0 & 1\\0 & 0\end{array}\right],\cdots,\left[\begin{array}{cc}0 & 1\\0 & 0\end{array}\right]\right)\]

avec p blocs diagonaux de taille 2

➤ Si n est impair, n=2p+1 :

    \[M=\text{diag}\left(\left[\begin{array}{cc}0 & 1\\0 & 0\end{array}\right],\cdots,\left[\begin{array}{cc}0 & 1\\0 & 0\end{array}\right],1\right)\]

avec p blocs diagonaux de taille 2 et un bloc de taille 1.

Par exemple :

    \[\text{si }n=4\text{ :}\qquad M=\left[\begin{array}{cccc}0 & 1 & 0 & 0\\0 & 0 & 0 & 0\\0 & 0 & 0 & 1\\0 & 0 & 0 & 0\end{array}\right]\]

    \[\text{si }n=5\text{ :}\qquad M=\left[\begin{array}{ccccc}0 & 1 & 0 & 0 & 0\\0 & 0 & 0 & 0 & 0\\0 & 0 & 0 & 1 & 0\\0 & 0 & 0 & 0 & 0\\0 & 0 & 0 & 0 & 0\end{array}\right]\]

Exemple E-3

Nous avons vu plus haut la formule de Grassmann, qui donne la dimension d’une somme de deux sev de dimensions finies. Voici une nouvelle preuve de ce résultat.

Notons E un \mathbb{K}-espace vectoriel et F,G deux sous espaces de dimensions finies.

Considérons l’application

    \[\varphi:F\times G\rightarrow E,\thinspace\left(x,y\right)\mapsto x+y\]

Il est facile de voir que \varphi est linéaire et que \text{Im}\left(\varphi\right)=F+G (simple affaire de définition).

Le noyau de \varphi est :

    \begin{equation*}\begin{split}\ker\left(\varphi\right) & = \left\{ \left(x,y\right)\in F\times G;\thinspace x+y=0\right\} \\ & = \left\{ \left(x,-x\right);\thinspace x\in F\cap G\right\}\end{split}\end{equation*}

Il est isomorphe à F\cap G, un isomorphisme naturel étant :

    \[\theta:F\cap G\rightarrow\ker\left(\varphi\right),\thinspace x\mapsto\left(x,-x\right)\]

Il s’ensuit que :

    \[\dim\left(\ker\left(\varphi\right)\right)=\dim\left(F\cap G\right)\]

La formule du rang montre alors que :

    \[\dim\left(F\times G\right)=\dim\left(\ker\left(\varphi\right)\right)+\dim\left(\text{Im}\left(\varphi\right)\right)\]

c’est-à-dire :

    \[\boxed{\dim\left(F\right)+\dim\left(G\right)=\dim\left(F\cap G\right)+\dim\left(F+G\right)}\]

7 – Dimension des espaces d’applications linéaires

Très utile aussi, une formule donnant la dimension de l’espace des applications linéaires de E vers F,E,F sont deux \mathbb{K}-espaces vectoriels de dimensions finies.

En fait, nous avons déjà établi — quoiqu’indirectement — cette formule, puisque nous avons vu que \dim\left(\mathcal{M}_{n,p}\left(\mathbb{K}\right)\right)=np.

Or, si l’on note p=\dim\left(E\right), n=\dim\left(F\right), \beta une base de E et \gamma une base de F, alors l’application

    \[\mathcal{L}\left(E,F\right)\rightarrow\mathcal{M}_{n,p}\left(\mathbb{K}\right),\thinspace u\mapsto Mat_{\beta,\gamma}\left(u\right)\]

est un isomorphisme (bijection linéaire) et donc d’après la règle C : \dim\left(\mathcal{L}\left(E,F\right)\right)=np.

Autrement dit :

(\clubsuit)   \[\boxed{\dim\left(\mathcal{L}\left(E,F\right)\right)=\dim\left(E\right)\thinspace\dim\left(F\right)}\]

Ce point de vue matriciel n’est pas le seul possible.

On peut établir directement la formule \left(\clubsuit\right) en exploitant le fait qu’une application linéaire est déterminée par les images des vecteurs d’une base. Ce principe (qui conduit à la notion de matrice d’une application linéaire relativement à un couple de bases) est étudié en détail dans cet article.

Fixons donc une base \left(e_{1},\cdots,e_{p}\right) de E et considérons l’application

    \[\Psi:\mathcal{L}\left(E,F\right)\rightarrow F^{p},\thinspace u\mapsto\left(u\left(e_{1}\right),\cdots,u\left(e_{p}\right)\right)\]

Le principe que nous venons de rappeler dit exactement que cette application est bijective : pour tout p-uplet \left(f_{1},\cdots,f_{p}\right) de vecteurs de F, il existe une application linéaire u:E\rightarrow F et une seule telle que :

    \[\forall j\in\left\llbracket 1,p\right\rrbracket ,\thinspace u\left(e_{j}\right)=f_{j}\]

Autrement dit, tout p-uplet de vecteurs de F possède un unique antécédent par \Psi.

En outre \Psi est linéaire (vérification aisée, non détaillée). Il s’agit donc d’un isomorphisme.

A nouveau, la règle C s’applique et permet de conclure que :

    \[\dim\left(\mathcal{L}\left(E,F\right)\right)=\dim\left(F^{\dim\left(E\right)}\right)=\dim\left(E\right)\dim\left(F\right)\]

Remarque

Un cas particulier important est celui du dual d’un \mathbb{K}-espace vectoriel E.

Il s’agit de l’espace \mathcal{L}\left(E,\mathbb{K}\right) des formes linéaires sur E, souvent noté E^{\star}. D’après ce qui précède, et vu que \dim\left(\mathbb{K}\right)=1, on voit que :

    \[\boxed{\dim\left(E^{\star}\right)=\dim\left(E\right)}\]

8 – Et lorsque la dimension est infinie ?

La question soulevée dans cette section est la suivante :

Comment prouver qu’un espace vectoriel donné est de dimension infinie ?

Lorsqu’un \mathbb{K}-espace vectoriel E est de dimension finie n, toute famille libre est finie et comporte au plus n vecteurs (ceci découle du lemme de Steinitz, qui est expliqué en détail dans cette vidéo).

Par conséquent :

Règle F

Pour établir qu’un espace est de dimension infinie, il suffit de prouver l’existence de familles libres de cardinal arbitraire.

Règle F-Bis

Pour établir qu’un espace est de dimension infinie, il suffit d’exhiber un sous-espace de dimension infinie.

Plus généralement : soient E et F des \mathbb{K}-espaces vectoriels, E étant de dimension infinie. S’il existe une application linéaire injective de E dans F, alors F est de dimension infinie.

Voyons quelques exemples d’utilisation de ces règles …

Exemple F-1

Pour tout entier n\in\mathbb{N} la famille de polynômes \left(1,X,\cdots,X^{n}\right) est libre dans l’espace \mathbb{K}\left[X\right] et comporte n+1 vecteurs. Comme n peut être choisie de façon arbitraire, ceci montre que \mathbb{K}\left[X\right] est de dimension infinie.

Exemple F-2

Dans cette vidéo, on prouve que, pour tout n\in\mathbb{N}, la famille constituée des applications :

    \[f_{k}:\left[0,2\pi\right]\rightarrow\mathbb{R},\thinspace x\mapsto\cos\left(kx\right)\qquad\left(0\leqslant k\leqslant n\right)\]

est libre dans l’espace des applications continues de \left[0,2\pi\right] dans \mathbb{R}.

Cet espace est donc de dimension infinie.

Bien entendu, le choix de l’intervalle \left[0,2\pi\right] ne joue aucun rôle particulier et la continuité peut être remplacée par une condition plus forte (voir exemple suivant).

Exemple F-3

Pour tout intervalle I\subset\mathbb{R} de longueur non nulle, l’espace des applications polynomiales de I dans \mathbb{R} est de dimension infinie. Il en résulte que l’espace C^{\infty}\left(I,\mathbb{R}\right) des applications indéfiniment dérivables de I dans \mathbb{R} (qui contient le précédent) est de dimension infinie.

Même chose pour l’espace des applications de classe C^{p} (pour tout entier p\in\mathbb{N}) de I dans \mathbb{R}.

Même chose pour l’espace \mathbb{R}^{I} de toutes les applications de I dans \mathbb{R}.

On a donc une chaîne d’espaces emboîtés, tous de dimension infinie :

    \[P\left(I,\mathbb{R}\right)\subset C^{\infty}\left(I,\mathbb{R}\right)\subset\cdots\subset C^{p}\left(I,\mathbb{R}\right)\subset\cdots\subset C^{0}\left(I,\mathbb{R}\right)\subset\mathbb{R}^{I}\]

Exemple F-4

Soient deux réels a<b.

Notons \mathcal{E} l’espace vectoriels des applications en escalier de \left[a,b\right] dans \mathbb{R}.

Rappelons qu’une application f:\left[a,b\right]\rightarrow\mathbb{R} est dite en escalier lorsqu’il existe une subdivision a=x_{0}<x_{1}<\cdots<x_{s}=b telle que la restriction de f à chacun des intervalles \left]x_{i-1},x_{i}\right[ (pour i\in\left\llbracket 1,s\right\rrbracket ) soit constante.

Si l’on pose, pour tout \alpha\in\left[a,b\right] :

    \[\delta_{\alpha}:\left[a,b\right]\rightarrow\mathbb{R},\thinspace t\mapsto\left\{ \begin{array}{cc}1 & \text{si }t=\alpha\\0 & \text{sinon}\end{array}\right.\]

alors \delta_{\alpha}\in\mathcal{E}.

De plus, si \alpha_{1},\cdots,\alpha_{n}\in\left[a,b\right] sont tous distincts, la famille \left(\delta_{\alpha_{i}}\right)_{1\leqslant i\leqslant n} est libre.

Il s’ensuit que \mathcal{E} est de dimension infinie.

On peut en déduire que l’espace des applications de \left[a,b\right] dans \mathbb{R} qui ne prennent qu’un nombre fini de valeurs est aussi de dimension infinie, puisqu’il contient \mathcal{E}.


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